14 mai 2018 - Concert Peretyatko - Bernheim à la Philharmonie de Paris.
Prometteuse affiche que celle de ce concert associant Olga Peretyatko-Mariotti et Benjamin Bernheim. Et promesse tenue.
Les deux voix se marient fort bien, toutes deux ayant un timbre léger, une émission puissante et des bases techniques à toute épreuve. À cela s’ajoute un plaisir évident à chanter ensemble, une énergie partagée et une envie perceptible de s’amuser, sans qu’aucun des deux ne semble vouloir entrer en compétition avec l’autre.
Nous n’avions pas eu le plaisir de l’entendre depuis près de deux ans et la voix d’Olga Peretyatko a évolué sensiblement. La pyrotechnie vocale est moins aisée que par le passé, les ornementations sont plus raisonnables, l’aigu est souvent attaqué par en dessous et certains trilles sont un peu lourds. Mais elle a gagné en puissance et la technique s’est affirmée : un mesa di voce somptueux, un legato irreprochable (dans « Casta Diva » par exemple) et une impressionnante longueur de souffle font d’elle une des meilleures interprètes du répertoire romantique italien. Mais le développement d’un medium chaud et coloré lui permet d’aborder Traviata (l’ »Addio » était bouleversant) ou Norma, dans lesquelles elle est très convaincante. Je l’ai trouvé en revanche moins à l’aise dans le répertoire français.
A l’inverse, la voix de Benjamin Bernheim se prête mieux à la musique française, dans lequel il est très expressif (un beau Roméo et un prometteur Werther, notamment) qu’il sert avec une diction parfaite et des couleurs très travaillées. Mais il reste très à l’aise dans le répertoire italien, auquel il prête un timbre ensoleillé. Ses qualités techniques lui autorisent des piani impressionants comme des aigus de poitrine puissants. Outre l’aisance impressionnante dont il fit preuve tout au long du concert, le plus frappant est le medium qui s’affiche très naturel.
A l’issue, ce sont trois bis qu’offriront les deux chanteurs, finissant d’enflammer un public qui était déjà entièrement conquis.
Il faut saluer la belle performance de l’orchestre de chambre de Paris et de ses solistes ainsi que le travail abouti du chef Giampaolo Bisanti qui parvient à joliment colorer ces morceaux si souvent entendus et à surprendre parfois nos oreilles dans ce programme que l’on aurait pu souhaiter moins traditionnel.
Dommage que la fête ait été un peu gâchée par l’acoustique d’église et l’excessive réverbération de la Philharmonie, qui est définitivement inappropriée à la voix. Heureusement, cette difficulté n’a pas empêché le public de manifester un grand enthousiasme et de faire un vrai triomphe aux protagonistes de cette belle soirée.
Programme et distribution :
Vincenzo Bellini (1801 - 1835)
Introduction
"Casta diva...Ah bello a me ritorna" (Norma)
Sinfonia (I Capuleti e i Montecchi)
Charles Gounod (1818 - 1893)
"Ah lève-toi, soleil!" (Roméo et Juliette)
"Je veux vivre" (Roméo et Juliette)
Gaetano Donizetti (1797 - 1848)
Ouverture (La Fille du Régiment)
"Oh luce di quest'anima" (Linda di Chamounix)
"Una furtiva lagrima" (L'Elisir d'amore)
Ouverture (Don Pasquale)
"Qui di sposa...Verranno a te sull'aure" (Lucia di Lammermoor)
Giuseppe Verdi (1813 - 1901)
"Oh fede negar...Quando le sere al placido" (Luisa Miller)
"Mercé dilette amiche" (I vespri Siciliani)
Prélude de l'Acte IV (La Traviata)
"Addio del passato" (La Traviata)
"Parigi o cara" (La Traviata)
Pietro Mascagni (1863 - 1945)
Intermezzo (Cavalleria Rusticana)
Giuseppe Verdi
"Ella mi fu rapita" (Rigoletto)
"Lo vidi e'l primo palpito" (Luisa Miller)
"E'il sol dell'anima... Addio speranza ed anima" (Rigoletto)
Bis
Eva Dell’ Acqua (1856 - 1930 )
La Villanelle, chanson pour soprano colorature
Jules Massenet (1842 - 1912)
« Pourquoi me réveiller ? » (Werther)
Gaëtan Donizetti
« Caro Elisir sei moi..Esulti pur la barbara... » (l’Elisir d’Amore)
Olga Peretyatko, soprano
Benjamin Bernheim, ténor
Orchestre de chambre de Paris, direction Giampaolo Bisanti