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Operaphile

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Comptes rendus de spectacles lyriques... entre autres choses....


12 juin 2018 - Samson et Dalila (Saint-Saëns) au Théâtre des Champs Elysées.

Publié par Jean Luc sur 21 Juin 2018, 20:02pm

Catégories : #Opera version concert

Œuvre emblématique de la musique française, Samson et Dalila fut pourtant créée en allemand à Weimar, à l’initiative de Liszt (2 décembre 1877). La création française devra attendre le 3 mars 1890 (au Théâtre des Arts de Rouen), pour une œuvre dont Saint-Saëns avait commencé l’écriture en 1859, probablement en raison d’un livret fort peu spectaculaire au regard du sujet et d’une composition qui semble hésiter entre les formes oratorio (aux actes I et III notamment) ou opéra (l’acte II).

Dirigeant cette version de concert, Mikhail Tatarnikov ne parvient pas à totalement convaincre. Techniquement, on ne peut que relever des défauts d’homogénéité entre les pupitres de l’Orchestre national de France et des décalages un peu trop nombreux avec le Chœur de Radio France, chœur dont la diction a de plus semblé parfois un peu pâteuse, mais dont les sonorités ont été le plus souvent somptueuses. Au plan musical, si Tatarnikov parvient à bien mettre en valeur les couleurs superbes de l’ONF, à nuancer à l’infini son interprétation et à soutenir efficacement les chanteurs, il semble hésitant sur le choix du style, ne parvenant à réellement convaincre que dans les moments où la partition se rapproche du grand opéra à la française, notamment à l’acte II.

Marie-Nicole Lemieux n’a pas vraiment la voix de Dalila. En grande artiste, elle compose un personnage en adéquation avec ses qualités techniques et insistera davantage sur la douceur du personnage, sur sa volonté de séduire que sur les ambiguïtés de Dalila et sa dimension sournoise, manipulatrice et vengeresse. De là une interprétation qui, ajoutée à la tendance de plus en plus marquée de « faire du Lemieux », n’est pas totalement convaincante, en dépit d’une diction impeccable et d’un chant conduit au sommet dans les grands airs de la fin du I et du II.

Ces difficultés ne sont pas celles de Roberto Alagna qui a parfaitement la voix et les moyens du rôle qui constitue indéniablement une de ses meilleures incarnations. La voix est large, sonore, parfaitement projetée, plus à l’aise toutefois dans les graves que dans des aigus qui semblent abordés avec une sorte de méfiance. Avec une diction parfaite qui s’appuie sur un timbre à la couleur séduisante, particulièrement dans le medium, il semble néanmoins peu libéré, rivé à la partition, alors qu’il vient de tenir le rôle à Vienne. Je n’ai pas partagé l’enthousiasme du public du TCE, faute d’avoir totalement adhéré à la composition de Roberto Alagna, pourtant techniquement et stylistiquement irréprochable. Quelque chose empêche de mon point de vue de croire à ce Samson… Peut-être lui a-t-il manqué une Dalila également scéniquement convaincante ? 

Laurent Naouri n’a pas la noirceur de timbre nécessaire au Grand Prêtre. Mais, au moyen d’une diction impeccable, d’une grande élégance du chant et de couleurs nuancées et très variées, il finit par construire un manipulateur déterminé et nous offre de superbes duos avec Marie-Nicole Lemieux.

L’Abimélech d’Alexander Tsymbalyuk est excellent. La voix est sonore, profonde, avec un bas medium superbe et une diction digne d’un chanteur francophone et son personnage menaçant est des plus réussis. 

Enfin, les autres rôles sont parfaitement tenus, notamment le Vieillard hébreu de Renaud Delaigue dont le beau timbre grave fait merveille et le Philistin de Jérémy Duffau, qui déploie un timbre limpide et un chant élégant et sonore.

Au total, le sentiment d’avoir assisté à une représentation ornée de multiples qualités mais à laquelle il manquait ce supplément d’âme, cette homogénéité dans l’incarnation, qui font les soirs inoubliables.

Programme et distribution 

Camille Saint-Saëns (1835-1921)

Samson et Dalila

Opéra en trois actes

Livret en français de Ferdinand Lemaire

Créé à Weimar au Hoftheater le 2 décembre 1877

 

Samson : Roberto Alagna

Dalila : Marie-Nicole Lemieux

Le Grand Prêtre : Laurent Naouri

Abimélech : Alexander Tsymbalyuk

Un vieillard hébreu : Renaud Delaigue

Un messager philistin : Loïc Félix

Premier Philistin : Jérémy Duffau

Deuxième Philistin : Yuri Kissin

 

Orchestre National de France

Chœur de Radio France, Chef de chœur : Martina Batič

 

Direction : Mikhail Tatarnikov

12 juin 2018 - Samson et Dalila (Saint-Saëns) au Théâtre des Champs Elysées.
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