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Operaphile

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Comptes rendus de spectacles lyriques... entre autres choses....


24 février 2025 – I PURITANI (Bellini) à l’Opéra national de Paris (Bastille).

Publié par Jean Luc sur 28 Février 2025, 17:13pm

Catégories : #bel canto

Chef d’œuvre de Bellini et de l’opéra romantique, dernier opéra de ce compositeur de génie, I Puritani connut une création triomphale, servie par une distribution exceptionnelle du quatuor de chanteurs principaux (Grisi, Rubini, Tamburini, Lablache). Car il y faut un quatuor d’exception, aujourd’hui comme hier, l’écriture des rôles étant particulièrement exigeante et nécessitant une technique belcantiste irréprochable. Le succès de l’œuvre fut tel que, en dépit des exigences de qualité que sa représentation impose, il ne connut jamais vraiment d’éclipse. Toutes les grandes sopranos se sont produites en Elvira, maintenant cet opéra à la scène pendant tout le XIXème et le XXème siècles.

I Puritani est une œuvre de transition, Bellini se confrontant à Paris à de nouvelles formes musicales portées par exemple par Meyerbeer ou Auber. C’est la période pendant laquelle le bel canto atteint son sommet et va bientôt entamer son déclin. La partition, qui caractérise I Puritani comme une œuvre de transition, confère à l’orchestre un rôle plus important tout en préservant les caractéristiques mélodiques de la ligne bellinienne. Truffée d’arias toutes plus célèbres et belles les unes que les autres, l’œuvre ne supporte pas l’approximation vocale ou orchestrale.

On retrouvait avec plaisir la mise en scène de Laurent Pelly, production qui a été créée à l’Opéra de Paris en 2013 (A lire ici) et déjà reprise en 2019 (Voir ici), dans les décors de Chantal Thomas et les lumières de Joël Adam. Treillages de ferronnerie épurée, éclairages soignés, véritable direction d'acteurs (et des mouvements des chœurs), l'ensemble est esthétiquement très réussi et produit des tableaux superbes à l’œil. Agréable à regarder, cette production n’en est pas moins porteuse de sens, puisqu’elle nous projette dans la psychologie d’Elvira, entre onirisme et cauchemar d’enfermement mental.

Sur scène, bien sûr, on attend le fameux quatuor des Puritains…

Lisette Oropesa est éblouissante en Elvira. L’aigu est facile (même si au premier acte, il est parfois un peu dur), le legato est sublime, les piani nombreux sont parfaitement projetés, les variations parsemées de superbes trilles sont toujours dans un style impeccable et un goût assuré (« Vieni al tempio » par exemple). Lisette Oropesa est aussi une formidable actrice, incarnant avec assurance une jeune femme qui sombre plusieurs reprises dans le délire. Tout en ambiguïté, son Elvira est rendue crédible tant par son jeu que par son chant qui sait éviter le piège de la virtuosité pure et désincarnée : de ce point de vue, son « Vien, diletto … » est une totale réussite.

Lawrence Brownlee est tout aussi impeccable dans le rôle d’Arturo, rôle à l’écriture invraisemblable avec ses contre ut, contre ré et le fameux contre fa écrit... Il assume sa partie avec panache et un chant très élégant, même si l’acteur est moins assuré que sa partenaire. Le timbre est séduisant, juvénile, la technique remarquable et le style irréprochable.

Roberto Tagliavini est un superbe Sir Giorgio dans lequel il déploie son somptueux timbre de basse, très rond et charnu, notamment aux extrémités du registre. Parfaitement projetée, la voix est enjoleuse et donne au personnage une profondeur et une présence inhabituelles et bienvenues. Son « Cinta di fiori…» est d’une émouvante beauté et le « Suoni la tromba », souligné par la mise en scène et l’éclairage est héroïque à souhait.

Andrii Kymach est un petit peu moins convaincant en Riccardo. L’incarnation du personnage est moins soignée que celle de ses partenaires et le timbre comme un peu engorgé est moins séduisant. Il n’en reste pas moins un très bon Riccardo et il est lui aussi impressionnant dans son duo avec Tagliavini (« Suoni la tromba »).

Les seconds rôles sont tous d’excellents niveaux. Manase Latu, au joli timbre de ténor, est un Bruno réussi, Maria Warenberg apporte à Henriette un timbre frais qui change des mezzos en fin de carrière et est très convaincante malgré l’écriture un peu compliquée du rôle, et Vartan Gabrielian est un excellent Gualtiero.

Le Chœur de l’Opéra de Paris fait, sous l’excellente direction de Ching-Lien Wu, des merveilles dans cette œuvre qui le sollicite beaucoup.

Au pupitre, Corrado Rovaris est un chef très attentif aux équilibres de sa formation et aux chanteurs qu’il accompagne avec une bienveillance soutenue. La direction est précise et enthousiaste et j’ai bien aimé les retenues de tempi dont il use assez largement, au bénéfice d’ailleurs de ses chanteurs. On peut toutefois regretter un certain manque d’inventivité et une interprétation parfois un peu monolithique, manquant un peu de nuances.

Les saluts sont accueillis par des ovations très appuyées, plutôt rares à Bastille, témoignant du plaisir du public et du caractère intemporel de la superbe musique de Bellini.

 

Crédits photographiques : © Sébastien Mathe

 

Programme et distribution :

 

I PURITANI, opéra seria en trois actes de Vincenzo Bellini (1801-1835)

Livret en italien de Carlo Pepoli

Créé le 24 janvier 1835 à Paris (Théâtre Italien)

                           

Elvira : Lisette Oropesa

Lord Arturo Talbot : Lawrence Brownlee                           

Sir Riccardo Forth : Andrii Kymach

Enrichetta : Maria Warenberg

Lord Gualtiero Valton : Vartan Gabrielian

Sir Giorgio Valton : Roberto Tagliavini    

Sir Bruno Roberton : Nicholas Jones

             

Mise en scène et costumes : Laurent Pelly

Décors : Chantal Thomas

Lumières : Joël Adam   

 

Orchestre et Chœurs de l'Opéra national de Paris                         

 

Direction musicale : Corrado Rovaris

 

24 février 2025 – I PURITANI (Bellini) à l’Opéra national de Paris (Bastille).
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