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Operaphile

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Comptes rendus de spectacles lyriques... entre autres choses....


29 avril 2025 – JEPHTE (Haendel) au Théâtre des Champs Elysées.

Publié par Jean Luc sur 30 Avril 2025, 17:08pm

Catégories : #Concert, #Opera baroque version concert, #Oratorio, #concert baroque, #musique sacrée

Jephté (ou Jepthah) est une des ultimes compositions de Haendel.  L’écriture de l’oratorio est ralentie et rendue complexe par la cécité qui gagne progressivement l’auteur. Inspiré d’un épisode du Livre des Juges de la Bible, l’ouvrage est traversé par des élans vitaux qui contrastent avec la mise en évidence de la cruauté de la destinée humaine soumise aux desseins, impénétrables comme chacun sait, de la puissance divine. L’oratorio chemine vers une résignation toute chrétienne, en forme de soumission à la Providence, notamment illustrée par le chœur qui conclut le deuxième acte « Whatever is, is right » (« Tout ce qui est, est juste »).

L’argument est classique et somme toute assez mince : sur fond du conflit entre Israël et les Amonnites, Jephté conduit les troupes et promet à Dieu, en échange de la victoire, de lui sacrifier la première personne qu’il croisera à son retour de la guerre. Ce sera sa propre fille, Iphis. Inaccessible à la supplique de son épouse Storgé comme à celles de Hamor, le fiancé d’Iphis, et de Zebul, son demi-frère, Jephté persiste dans son intention d’exécuter son vœu, en dépit de sa souffrance. Au moment où le sacrifice s’apprête, un ange apparaît et délie le serment de Jephté. Mais Iphis devra consacrer sa vie à Dieu et demeurer vierge. Tous se réjouissent alors de ce dénouement, sauf le malheureux Hamor. L’histoire de Jephté a été reprise à plusieurs reprises, notamment par Giacomo Carissimi dont l’oratorio a d’ailleurs été joué ici même en 2024 (A lire ici).

Dans le rôle-titre, Michael Spyres est impeccable. Le timbre est superbe, d’une homogénéité à toute épreuve, la voix est projetée avec aisance et uniformité sur tout le registre. La vocalisation est souple, les nuances variées et il caractérise sans peine les différents affects du personnage. Dans une interprétation absolument irréprochable du personnage, on retiendra en particulier un impressionnant « Open thy marble jaws ».

Face à lui, la Storgè de Joyce di Donato est tout aussi impressionnante. Profondément maternelle et émouvante dans « In gentle murmurs » elle est saisissante dans l’air déchaîné du II « Let other creatures die », dans lequel elle va jusqu’à noircir l’émission et à poitriner les graves pour accentuer les effets dramatiques.

L’Iphis de Melissa Petit gagne en confiance au long de la représentation et le joli timbre de soprano, assis sur une technique solide, trouve à donner toute sa noblesse et son dévouement un rien naïf au personnage. L’Hamor de Jasmin White est une très belle réussite. Le timbre de la contralto a gagné en nuances et sait désormais sortir des couleurs sombres de sa tessiture pour varier une palette de couleurs et d’émotions tout à fait convaincante.

La distribution du rôle de Zebul à un baryton est un peu surprenante pour un personnage qui manie quand même quelques graves…. Si Cody Quattlebaum s’engage avec conviction dans son interprétation et s’il est à l’aise dans le registre central et dispense quelques très beaux aigus, le bas du registre trouve assez vite ses limites et manque de puissance.

Le chœur de Il Pomo d’Oro nous gratifie d’une splendide et remarquable prestation : homogène, précis, capable de belles nuances, il maintient des interventions de très haut niveau tout au long d’une soirée au cours de laquelle il est très sollicité.

A la tête d’un orchestre Il Pomo d’Oro en très grande forme, Francesco Corti délivre du très grand Haendel : il sait illustrer les différents affects de la partition avec une grande précision et un sens avéré de la nuance et des couleurs. De la très belle ouvrage.

Le public a réservé de longues ovations, méritées, à ce très beau spectacle qui va désormais tourner en Europe.

 

Crédits photographiques : © Jean-Yves Grandin

 

Programme et distribution :

 

JEPHTE, Drame sacré en trois actes de Georg Friedrich Haendel (1685-1759)

Livret en anglais du Révérend Thomas Morell d'après le Livre des Juges

Créé le 26 février 1752 à Londres (Royal Theatre, Covent Garden)

 

Jephtha : Michael Spyres

Storgé : Joyce DiDonato

Iphis : Mélissa Petit

Zebul : Cody Quattlebaum

Hamor : Jasmin White

L’ange : Anna Piroli

 

Francesco Corti | direction

Orchestre et Chœur :  Il Pomo d’Oro

 

Direction musicale : Francesco Corti

29 avril 2025 – JEPHTE (Haendel) au Théâtre des Champs Elysées.
29 avril 2025 – JEPHTE (Haendel) au Théâtre des Champs Elysées.
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