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Operaphile

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Comptes rendus de spectacles lyriques... entre autres choses....


30 avril 2025 – LE FREISCHUTZ (Weber) au Théâtre des Champs Elysées.

Publié par Jean Luc sur 6 Mai 2025, 09:19am

Catégories : #Opera version concert, #concert

Souvent considéré comme l’œuvre fondatrice de l’opéra allemand, Le Freischütz marque aussi d’une certaine façon la fin de l’exclusivité de l’influence italienne sur l’opéra et est caractéristique du renouveau musical qui se traduit par l’accession aux scènes prestigieuses des formes plus populaires, comme le singspiel

Le livret repose sur une légende germanique du XVème siècle, dans laquelle les balles sont gouvernées par le diable. Toutefois, pour éviter les foudres de la censure, le librettiste modifiera l’issue de l’histoire, permettant un happy end qui contraste avec la noirceur soutenue et le fantastique de l’ouvrage.

Donner un singspiel en version de concert n'est pas chose aisée au regard de l’importance des dialogues, évidemment écrits en allemand. Le choix fait dans cette production a été de couper tous les dialogues, à l’exception de quelques échanges entre Max et Kaspar dans la scène de la Gorge-aux-Loups. Le texte confié à Samiel, rôle parlé dans la version originale, a été entièrement réécrit par Steffen Kopetzky, écrivain allemand contemporain, ici traduit en français par Lukas Hemleb et Laurent Muhleisen. Si le texte dégage une forme de poésie et assume la dimension fantastique, il n’en est pas moins un rien ampoulé, notamment dans ses digressions philosophiques. Confier le rôle du démon à une femme est un choix qui n’apporte pas grand-chose. Si Johanna Wokalek bénéficie d’une fort jolie voix, elle a toutefois un accent allemand qui charge curieusement le rôle du diable et qu’elle tente inutilement de corriger. Cette volonté de correction la fait buter sur les mots à de nombreuses reprises, accentuant la rupture que le texte lui-même fait subir au déroulement dramatique.

Dans les rôles secondaires, Levente Páll est un Ottokar tout à fait royal et digne et Jongmin Park est un Ermite convaincant et bien chantant, tout comme son Kuno. Mais c’est surtout le baryton-basse Milan Siljanov qui était marquant, incarnant Kilian avec beaucoup de conviction et une voix particulièrement bien timbrée et projetée.

Nikola Hillebrand est tout aussi convaincante en Ännchen. Son interprétation est pétillante à souhait, voire piquante par moments, le timbre est particulièrement séduisant dans sa légèreté. Son « Trübe Augen », superbement accompagné à l’alto, est très réussi.

Le méchant de service, en l’occurrence le chasseur Kaspar qui a passé un pacte avec le diable, c’est Kyle Ketelsen qui délivre une prestation impeccable. Il sait être particulièrement inquiétant et glaçant, notamment dans « Schweig! Schweig! damit dich niemand warnt! » au long duquel il déroule un superbe timbre et une voix parfaitement projetée.

L’Agathe de Golda Schutz est tout empreinte de sensualité et son très beau timbre rond et chaud fait merveille au III dans une émouvante prière. La technique est très maitrisée et elle délivre des piani/pianissimi de toute beauté, servant une lecture humaine et moderne de son rôle.

Charles Castronovo réalise une prise de rôle réussie en Max. Son Max a une vocalité un peu inattendue, italienne en somme, mais le timbre est chaud et l’interprétation enthousiaste et élégante sert très bien un personnage juvénile et naïf.

Le RIAS Kammerchor est exceptionnel, en particulier dans la scène de la Gorge-aux-Loups. Précis et très homogène, il arrive à caractériser de façon très réaliste ses différentes interventions, pourtant de styles très variés.

Antonello Manacorda dirige la Kammerakademie Potdsam avec enthousiasme et une très grande maitrise. L’ouverture est particulièrement éclatante et contrastée, et toute la soirée sera un véritable festival de nuances et de couleurs. Très attentif aux chanteurs, il donne une énergie impressionnante à chacun des pupitres de l’orchestre qui sonne avec beaucoup d’élégance.

Ce Freischütz est une réussite indiscutable, saluée par un public particulièrement enthousiaste.

 

Crédits photographiques : Jean-Yves Grandin

 

Programme et distribution :

 

DER FREISCHUTZ, opéra en trois actes de Carl Maria Von Weber (1786-1826)

Livret en allemand de Johann Friedrich Kind

Créé le 18 juin 1821 à Berlin (Königliches Schauspielhaus)

 

Max : Charles Castronovo

Agathe : Golda Schutz

Kaspar : Kyle Ketelsen

Ännchen : Nikola Hillebrand

Kuno / l’Ermite : Jongmin Park

Kilian : Milan Siljanov

Ottokar : Levente Páll

Samiel (rôle parlé) : Johanna Wokalek

 

Kammerakademie Potdsam

RIAS Kammerchor

 

Direction musicale : Antonello Manacorda

30 avril 2025 – LE FREISCHUTZ (Weber) au Théâtre des Champs Elysées.
30 avril 2025 – LE FREISCHUTZ (Weber) au Théâtre des Champs Elysées.
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