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Operaphile

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Comptes rendus de spectacles lyriques... entre autres choses....


1er octobre 2025 – POMPEO MAGNO (Francesco CAVALLI) au Théâtre des Champs Elysées.

Publié par Jean Luc sur 2 Octobre 2025, 16:56pm

Catégories : #Opera version concert, #concert baroque, #musique baroque, #opera baroque

Composée par Cavalli pour Venise à son retour de Paris, cette œuvre est une forme de conclusion des premières décennies de l’opéra en tant que genre. L’œuvre est ainsi proprement ébouriffante, véritable vitrine de ce que l’opéra peut être en termes de théâtre comme en termes de musique. Tous les affects y sont présents et se juxtaposent les uns aux autres dans un énorme désordre, très proche encore de la commedia dell’arte : le drame et la comédie, les sentiments nobles et le grotesque, les destinées historiques et les misères humaines, l’amour et la jalousie, le pouvoir et les intrigues, la trahison et la loyauté…

L’histoire qui nous est contée est totalement alambiquée et se soucie fort peu de vraisemblance. Pour faire (très) court : Pompée rentre à Rome en héros et tombe amoureux de la fille de César, déjà promise à un autre, pendant que son fils Sesto veut épouser Issicraeta, veuve de Mithridate, lequel n’est pas mort mais met à l’épreuve la fidélité de sa femme et la loyauté de son fils Farnace… A l’issue de nombreux rebondissements, parmi lesquels la condamnation à mort de son fils, injustement accusé, Pompeo rendra son royaume à Mithridate et pourra épouser Giulia…

La production reprend, en version de concert, la production créée à Bayreuth le 4 septembre dernier. Pas de mis en scène, donc, mais une mise en espace soignée et très réussie, jouant aussi des éclairages, comme dans la longue scène nocturne éclairée aux bougies, et très poétique. Au tout début de la représentation, Leonardo García-Alarcón prend la parole pour expliquer rapidement l’histoire compliquée qui va être jouée et pour présenter les personnages. Initiative agréable et fort bienvenue tant le livret est décousu et la distribution pléthorique.

A la tête de sa Cappella Mediterranea, Leonardo García-Alarcón fait briller de tous ses feux cette musique du seicento dans laquelle il s’impose en spécialiste. Le continu est brillantissime mais percuté sans cesse par des inventions sonores ou rythmiques, par des percussions ou des vents qui soulignent l’action comme de la musique de cirque, et qui donnent vie à cette œuvre, émaillée de rythmes dansants et d’une énergie permanente et complice. C’est une superbe fête baroque que cette interprétation joyeuse et décomplexée !

De même, le plateau vocal, emporté par cette énergie, est tout à fait passionnant.

Le Delfo de Dominique Visse est très engagé mais semble vocalement un peu terne face à la délirante Atréa de Marcel Beekman, qui surjoue son personnage de vecchia pazza avec l’énergie, la gourmandise et le talent comique qu’on lui connait. Kacper Szelazek est une Arpalia bête et méchante, aux rires stridents et tonitruants. Le Crassus de Jorge Navarro Colorado a peu à chanter mais ses interventions sont de très bonne facture. Victor Sicard est un César bien chantant, tout empreint de sa propre gloire et de sa dignité.

Valer Sabadus accuse une voix un peu fatiguée qui n’a plus l’éclat d’autrefois mais il est crédible en Servilius auquel il consacre une belle énergie. Mieux servi par le rôle de Claudio, Nicholas Scott est impressionnant dans son rôle de fils de célébrité, libidineux et contrefait. Lucía Martín-Cartón est une admirable Giulia : le timbre est beau, la voix est souple et agile et l’interprétation est parfaitement crédible qu’il s’agisse des élans amoureux naïfs ou de son interprétation pincée des contrariétés que lui inflige Servilius.

Alois Mühlbacher est Farnace, le fils de Mithridate. Le timbre malgré quelques acidités est tout à fait séduisant, rayonnant et se prête parfaitement à l’incarnation du personnage du jeune adolescent loyal et attachant. Son père Mithridate, personnage complexe voire contradictoire, est chanté par Valerio Contaldo qui lui prête son très beau timbre riche, très expressif et qui fait exister une figure paternelle rassurante et séduisante. La sérénade accompagnée à la guitare est un très beau moment d’émotion.

Le Sesto de Logan Lopez Gonzalez n’appelle que des éloges. Un peu sur la réserve au début de la représentation, le contreténor fait ensuite rapidement étalage de ses nombreuses qualités de timbre et de technique. La voix est très belle, la projection et la maitrise des nuances sont de très grande qualité et le chant conduit avec beaucoup de sensibilité se prête facilement aux intentions du chanteur. On retiendra en particulier une phénoménale scène d’ivresse en première partie, d’un comique parfaitement maitrisé et jamais lourd et, en deuxième partie, la très émouvante interprétation de la scène dans les appartements d’Issicratea ou encore de celle qui suit sa condamnation à mort.  

Mariana Flores à qui échoit le rôle central d’Issicratea est d’une présence scénique époustouflante. Grande spécialiste de cette période, elle saisit le rôle à bras le corps, dans toutes ses facettes et sa complexité, malgré quelques notes émises un peu à l’aventure. Bien projetée, la voix est parfaitement adaptée à ce style de musique, et la technique des récitatifs, nombreux, est irréprochable. L’interprétation qui en résulte est tout à fait remarquable tant le personnage fascine le spectateur.

Reste le Pompeo de Max Emmanuel Čenčic. Le rôle n’est pas le plus important de l’opéra mais le contreténor en donne une lecture intéressante, qui fait du général un être vieillissant et désabusé. Le timbre et le legato de Max Emmanuel Čenčic sont intacts et la voix sonne toujours aussi bien, en conservant ce côté sfumato qui a fait son succès.

Malgré un public moins nombreux que souvent au TCE, la représentation s’est conclue sur de longs et enthousiastes applaudissements, parfaitement justifiés au regard de la très grande qualité de cette production.

 

Programme et distribution :

 

POMPEO MAGNO, Dramma per musica en trois actes de Francesco CAVALLI (1602-1676)

 

Livret en italien de Nicolo Minato

Créé le 20 février 1666 à Venise (Teatro San Salvatore)

 

Pompeo : Max Emanuel Cenčić

Issicratea : Mariana Flores

Mitridate : Valerio Contaldo

Sesto / Principe cavaliero : Logan Lopez Gonzalez

Farnace/Amor : Aloïs Mühlbacher

Harpalia / Genio di Pompeo :  Kacper Szelążek

Cesare / Principe cavaliero : Victor Sicard

Claudio / Principe cavaliero : Nicholas Scott

Giulia : Lucía Martín-Cartón

Servilio / Principe cavaliero : Valer Sabadus

Crasso : Jorge Navarro Colorado

Atrea : Marcel Beekman

Delfo : Dominique Visse

 

Cappella Mediterranea

 

Direction musicale : Leonardo García-Alarcón

1er octobre 2025 – POMPEO MAGNO (Francesco CAVALLI) au Théâtre des Champs Elysées.
1er octobre 2025 – POMPEO MAGNO (Francesco CAVALLI) au Théâtre des Champs Elysées.
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