Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Operaphile

Operaphile

Comptes rendus de spectacles lyriques... entre autres choses....


4 mars 2024 – Les Pêcheurs de perles (Bizet) au Théâtre des Champs Elysées.

Publié par Jean Luc sur 9 Mars 2024, 17:09pm

Catégories : #Concert, #Opera version concert

Financée par subvention publique, la création des Pêcheurs de Perles eut lieu au Théâtre du Châtelet (alors Théâtre-Lyrique) le 30 septembre 1863. Bizet a alors 25 ans et il est titulaire du Grand Prix de Rome de composition musicale. Située à Ceylan, l’intrigue repose sur le serment échangé par deux amis, amoureux de la même femme, de ne pas chercher à la séduire. L’un deux brisera ce serment ; l’autre pardonnera in fine.  L'opéra connut des fortunes très diverses ; si à la création la musique fut jugée trop wagnérienne, c'est surtout dans un livret véhiculant nombre des poncifs éculés de l'opéra qu'il faut rechercher la cause de cette relative infortune. Cet ouvrage illustre parfaitement la fascination orientaliste de l’époque et, plus de dix ans avant Carmen, et malgré son parti pris parfois excessif d’exotisme, il comporte en germes ce qui fera le succès de Carmen, et notamment une orchestration somptueuse, une composition aussi habile à décrire les moments intimes que le drame et les emportements collectifs et enfin, un grand nombre de numéros de toute beauté, passés à la postérité, comme la romance de Nadir, le thème de La Déesse qui porte le duo de Nadir et Zurga, ou encore le superbe duo Nadir/Leïla.

L’ouvrage, pour ne pas tomber dans la caricature de lui-même, requiert des interprètes de grand style, rompus au chant français, à commencer par l’exigence qui repose sur un quatuor de chanteurs qui se doit d’être exceptionnel.

Le quatuor aligné ce soir pour cette version de concert au TCE a relevé le gant, à l’exception de Sandra Hamaoui dont la voix un peu dure ne sied guère au personnage. La projection limitée, un medium un peu étroit et une diction souvent un peu trop approximative ne sont pas compensés par un haut du registre brillant et puissant, souvent courageusement engagé, qualités évidentes mais qui ne suffisent pas à caractériser Leïla.

En Nadir, Jonah Hoskins fait montre de grandes qualités qui lui permettent d’assurer sans aucune difficulté ce rôle parfaitement représentatif de la place du ténor dans l’opéra français de l’époque. Le timbre est délicat, subtil, mais la voix manque un peu de volume et la diction est parfois prise un peu en défaut. Sa romance, quoique la prise de risque y soit très maitrisée, est très réussie et il parvient à faire bien plus que tirer son épingle du jeu dans le duo avec Zurga, dont la voix est bien plus puissante.

Joshua Hopkins interprète Zurga. A une voix puissante mais qui sait s’adapter avec subtilité au volume sonore de ses partenaires, le baryton joint une grande aisance technique et une diction française irréprochable. Son Zurga sait passer de l’autorité à la faiblesse, sait chanceler devant l’amour et l’amitié. Et tout ceci fait une interprétation très émouvante.

Matthieu Lécroart est un Nourabad de luxe. Sa présence est palpable à chacune de ces interventions, même si la partition ne lui ménage que de petites interventions. La voix puissante déploie une diction impeccable, au service d’une incarnation du fanatisme inébranlable.

Le plus remarquable de cette soirée fut la direction enfiévrée, brûlante, de Lorenzo Passerini qui déploie tous les fastes de cette partition dont il semble vivre intensément chaque note. La masse orchestrale est brillante, volumineuse sans jamais être écrasante. Il donne chaque départ, souligne chaque inflexion des chœurs et cisèle une interprétation qui met en avant les pupitres, singulièrement les bois. Parfaitement suivi et servi par l’Orchestre de chambre de Paris qui atteint de sommets d’expressivité que ce soit dans l’expression de la peur, de l’horreur ou dans l’intime et les affects qui lient les trois protagonistes principaux. Sans atteindre au même niveau d’excellence, le Chœur de chambre de Rouen, dirigé par Frédéric Pineau, offre une prestation de haut niveau, précise et engagée.  

La salle, comble, a réservé un très gros succès à cette production et a particulièrement - et à très juste titre - salué le travail du maestro Passerini et de l’Orchestre de chambre de Paris.

 

Crédits photographiques : © Jean-Yves Grandin

 

Programme et distribution :

Georges BIZET (1838-1875)

LES PECHEURS DE PERLE

Opéra en trois actes

Livret en français de Michel Carré et Eugène Cormon

Créé le 30 septembre 1863 à Paris (Théâtre Lyrique).

 

Leïla : Sandra Hamaoui

Nadir : Jonah Hoskins

Zurga : Joshua Hopkins

Nourabad : Matthieu Lécroart

 

Orchestre de chambre de Paris

Chœur de chambre de Rouen, direction Frédéric Pineau

Direction musicale : Lorenzo Passerini

4 mars 2024 – Les Pêcheurs de perles (Bizet) au Théâtre des Champs Elysées.
4 mars 2024 – Les Pêcheurs de perles (Bizet) au Théâtre des Champs Elysées.
4 mars 2024 – Les Pêcheurs de perles (Bizet) au Théâtre des Champs Elysées.
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article

Archives

Nous sommes sociaux !

Articles récents