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Operaphile

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Comptes rendus de spectacles lyriques... entre autres choses....


20 septembre 2017 - La Veuve Joyeuse (Lehar) à l’Opera de Paris (Bastille).

Publié par Jean Luc sur 21 Septembre 2017, 18:51pm

Catégories : #Opera mis en scene

 

 

La Veuve Joyeuse est un des plus grands succès de l’opérette viennoise qui a assuré la notoriété à son compositeur Franz Lehar. La création en 1905 est consacrée par un succès foudroyant : 20000 représentations dans le monde en 4 ans. La création parisienne en 1909 confirmera ce succès et la version française écrite pour l’occasion par les auteurs-rois du boulevard (Robert de Flers et Gaston de Caillavet) éclipsera la version d’origine.

 

C’est pourtant la version d’origine, en allemand, qu’a choisi de produire l’Opéra de Paris, même si quelques dialogues sont en français. Au-delà on peut s’étonner des choix de l’Opera : reprendre la mise en scène qui alourdit délibérément mais malencontreusement l’oeuvre, qui n’est pas un modèle d’adaptation à Bastille, le choix même de cette salle qui ne contribue pas à alléger ces pesanteurs du fait de ces exigences pour les formats vocaux des interprètes et enfin la sonorisation des dialogues parlés qui rend certes un peu de liberté aux chanteurs mais qui est perturbante à l’oreille. 

 

La mise en scène de Jorge Lavelli est d’un grand classicisme et la beauté du grand parquet-décor est indéniable. Mais l’immense plateau de Bastille reste quand même très nu et c’est bien gênant dans les moments intimes, malgré les « astuces » pour réduire l’espace (un peu trop visibles) à l’aide de grands rideaux rouges et de faisceaux d’eclairage. Il y a aussi quelque chose de très pesant dans les parti pris de cette mise en scène... Comme une incapacité à assumer le vaudeville et une volonté de souligner un mélodrame qui n’existe pas vraiment. S’il y a probablement une intention un peu triste dans la richesse mélodique de l’oeuvre (la chanson de Vilya ou le duo de l’Heure exquise), la mise en scène en fait des tonnes comme pour nous interdire de nous abandonner à la légèreté. Et passe à côté de véritables perles, comme la scène des grisettes traitée avec un tel cynisme qu’elle en perd tout charme.

 

Et ce n’est pas le 1er acte dirigé par Marius Stieghorst qui va faire pétiller le champagne de cette Veuve. C’est pesant, lourd, sans invention.... Le deuxième acte se réveillera, notamment avec une superbe Chanson de Vilya, mais ce n’est qu’au court troisième acte que l’on sentira enfin que le Chef peut communiquer de l’entrain à un orchestre de l’Opera auquel on a connu de meilleurs moments. Et, bien aidé par les acrobatiques danseurs, le cancan final finira par mettre un peu de vraie gaieté dans cette soirée.

 

Heureusement, il y a Véronique Gens. Chic et glamour, le timbre est vibrant, la voix impeccablement projetée et toujours cette articulation, ce sens du phrasé qui signe ses interprétations. Le redoutable air d’entrée (Bitte, meine Herrn) est envoyé avec une aisance confondante et la chanson de Vilya est un moment de pure beauté que Véronique Gens pare de couleurs mélancoliques.  

 

Thomas Hampson est un Danilo exceptionnel, tout en séduction un rien cynique, servi par un sens aigu du chant et du théâtre et un plaisir manifeste à se couler dans ce personnage. Il semble toutefois en difficulté à plusieurs reprises avec une écriture du role peut être un peu haute et qui produit des aigus blancs et metalliques. Mais le medium reste d’un moelleux de violoncelle tellement séducteur !  On retrouve le grand interprète qu’il est dans un troisième acte à l’ecriture plus centrale pour son rôle . Il compose avec Véronique Gens un couple de grand standing, au chic à fleur de peau. 

 

J’ai adoré retrouver Stephen Costello. Le style est excellent, l’aigu brillant et coloré et la projection très travaillée. Peut être trop d’ailleurs car la recherche de ses appuis nuit parfois un peu à son Camille qui peut sembler un peu raide dans certaines de ses attitudes. Mais n’est ce pas un peu inévitable face à l’immensité de Bastille ?

 

A l’inverse, Valentina Narfonita (Valencienne) est étouffée, le timbre est acide et un peu grinçant et même si son interprétation est assez remarquable, la performance vocale n’est pas à la hauteur. 

 

Reste le nombre impressionnants de « petits » rôles dans lesquels on saluera les excellents Cascada d’Alexandre Duhamel et Saint-Brioche de Karl Maria Ebner et le Njegus parlé de Siegfried Jerusalem. J’ai été en revanche un peu déçu par le Baron de Franck Leguerinel qui se donne à fond dans son jeu mais dont le chant est peu précis et dont le vibrato très accentué au premier acte est inquiétant. 

 

Au total, si le public n’a pas boudé son plaisir, mon appréciation de cette soirée est un peu trop contrastée pour en faire une soirée exceptionnelle, même si Véronique Gens et Stephen Costello ont su parfaitement se montrer à la hauteur des illustres interprètes qui les ont précédé.

 
 20 septembre 2017 - La Veuve Joyeuse (Lehar) à l’Opera de Paris (Bastille).
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