Plutôt belle soirée que cette nouvelle production de Tosca à Bastille. La mise en scène de Pierre Audi est consistante, convaincante et ce n'est pas une mince performance après les très nombreuses reprises de la production de Werner Schroeter. Pas de transposition, pas d'effets surajoutés, juste ce choix de l'omniprésence de l'Eglise et de son oppression. Choix décliné avec une très grande pertinence sur les trois personnages principaux : foi ardente de Tosca, prétexte et outil politique pour Scarpia, rejet et rébellion pour Cavaradossi. La direction d'acteurs est en revanche plus faible et tous ne s'en tirent pas au mieux (voir ci-dessous).
La direction de Daniel Oren est assez calamiteuse.... Le choix de tempi ralentis est systématisé au point qu'on finit par se demander s'il s'agit d'un parti pris esthétique ou d'une difficulté de mise en place des équilibres de l'orchestre.... Et l'on penche pour la seconde option au fur et à mesure du déroulement de la soirée. Mais ce qui pourrait être une simple coquetterie un peu malvenue devient franchement irritant quand cela met en difficultés les chanteurs qui se voient obligés, outre le déploiement de puissance que leur inflige cette salle de travailler une longueur de souffle inappropriée.... avec, inévitablement, quelques respirations mal positionnées.....
La Tosca de Martina Serafin m'a un peu laissé sur ma faim. Elle est parfaite au deuxième acte (même si le Vissi d'arte est couronné par un aigu final très durci et tenu dans des conditions de justesse discutables) mais semble s'économiser au premier et parait en difficulté au troisième au cours duquel les aigus se durcissent et le vibrato s'alourdit dangereusement. Le Mario de Marcelo Alvarez est vocalement impeccable et proprement bouleversant dans Recondita armonia, Ê lucevan le stelle et dans O dolci mani. Engagement sans faille, très belle projection, capable de nuances vraiment impressionnantes passant du piano-pianissimo à la véhémence des Vittoria du 2ème acte, il est vocalement une incarnation parfaite de Cavaradossi. L'acteur est moins à l'aise, peu aidé par l'absence de direction d'acteurs et verse parfois dans la posture empruntée...
Très attendue, la prise de rôle de Ludovic Tezier en Scarpia est un réussite. Le chant est fluide, nuancé, le timbre beau et rond, la voix bien projetée. Il incarne un Scarpia plus "ordinaire", plus humain que la plupart des autres interprétations, évitant de trop forcer sur la noirceur du personnage, insistant davantage sur son cynisme, sa totale absence de scrupule et d'empathie. Sa prestation au deuxième acte, superbement accompagnée par celle de Martina Serafin, donne à cette scène toute son ampleur dramatique et atteint des sommets de tragédie.
16 octobre 2014 - Tosca à Bastille.
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